La tournée
 
L'activité s'effectuait souvent en famille, avec les enfants qui apprenaient le métier et les itinéraires. Souvent, les neveux roulaient la campagne avec l'oncle. Si on ne roule pas en famille on roule entre gens du même village.
Sur les 53 permis délivrés en 1863 par la préfecture du Doubs, 20 l'ont été en faveur de ressortissants des Hautes-Pyrénées et de la Haute-Garonne. Ils arrivaient des villages de Boutx (6), de Cuguron (3), de Ferrère (2), de Ardiège (2), du Haut et Bas Nistos, de Ourde ou encore de Ore. Dans les années qui suivent, on retrouve les mêmes noms : les Battmalle (Guillaume, Jean, Louis) de Boutx, les Sarrat (Jean-Baptiste, François...) de Cuguron. On peut citer encore les Nouguès de Boutx. Les Pyrénéens rencontrent les colporteurs comtois, les uns et les autres s'arrangent pour ne pas vendre les mêmes marchandises.
 
Dans la balle du colporteur
 
De constitution solide, le colporteur porte sur ses épaules une balle, souvent une caisse ouvrante munie de casiers où sont rangés les produits proposés (images, lunettes, articles de Paris...), tels  les « montreurs de Saint-Hubert », qui au fond de leurs petites armoires de sapin, découvrent une image du saint. La charge varie entre 40 et 60 kilogrammes. Les plus fortunés trafiquent avec un mulet bâté.
Ils apportent les objets produites par la ville: petits livres (almanachs ou livrets de la bibliothèque bleue), quincailleries, mercerie et étoffes de couleurs pour les coquettes villageoises, bibeloterie religieuse, ou encore des graines ... Le colporteur de librairie est un cas à part. Les petits livrets qu'ils répandent contribuent à faire naître chez les villageois un besoin de lecture. Il  distribue les almanachs imprimés dans l'été, avant les fêtes de Noël et offre ainsi aux paysans l'accès au savoir.
 
Le parcours de Michel Guillaume, originaire de Salechau (Hautes-Pyrénées) en 1854
 
Agé de 20 ans, le 14 mars, il obtient un permis pour la Haute-Garonne, le 24 mars il était à Toulouse, le 27 mars à Nîmes, le 4 avril dans la Drôme, le 12 avril dans le Rhône, le 20 avril dans l'Ain, le 21 à Mâcon ; le 1er mai, il atteint le Jura ; le 22 mai, il est dans le Doubs, il revient dans le Jura le 7 juillet ; le 28 juillet il obtient un nouveau passeport pour le Doubs. Colporteur d'été, il colporte seulement à la belle saison. De la Haute-Garonne, par Toulouse, il gagne le Doubs en remontant la vallée du Rhône.
 
La fin du métier
 
On a pu estimer à plus de 5 000 les colporteurs de librairie vers 1850. Il n'en restait que 500 en 1871. D'une manière générale, le chemin de fer, les tracasseries policières du Second Empire, qui avait créé la fameuse commission du contrôle du colportage en 1852, ont porté de rudes coups à ces marchands nomades. Certains continueront à colporter, signe d'un temps nouveau, en empruntant le chemin de fer.
 
Pour en savoir plus
 
- Darmon (Jean-Jacques), Le colportage de librairie sous le Second Empire, Plon, 1972.
- Poitrineau (Abel), Remues d'hommes, les migrations montagnardes en France 17-18 siècles, Aubier, 1983.
- Fontaine (Laurence), Histoire du colportage en Europe XVe-XIXe siècles, Albin Michel, 1993.
- Vernus (Michel), Pourquoi le messager boitait-il ? Histoire d'un almanach fameux, Alan Sutton, 2003 ; « L'almanach dans un pays de contacts, la Franche-Comté », in Lectures du peuple en Europe et en Amérique, éditions Complexe, 2003.
« ILS ROULAIENT LA CAMPAGNE », LES COLPORTEURS
Parmi tous les errants et nomades de l'Ancienne France, les colporteurs ont joué un rôle essentiel de distribution des marchandises dans les campagnes. Leur activité atteint le plus haut point entre 1700 et 1850. Pour le plus grand nombre, ils descendent des montagnes. « Porte-balles », « mercelots », « camelots », « marchands merciers », ils arrivent de l'Auvergne, de  la Savoie, du Jura ou des Vosges, plus tard des Pyrénées.
Ils introduisent au pied du clocher un peu de la modernité urbaine autant par leurs marchandises que par les informations et les idées qu'ils véhiculent, véritables gazettes venues du monde extérieur. Un rythme annuel les ramène au village.
 
Les différentes figures du colporteur
 
A l'origine, ils diffusent les produits fabriqués par les artisans de leur village, ensuite ils apprennent à se réassortir au long de la route chez des grossistes. Certains sont les commanditaires de marchands ou fabricants en gros, parfois même de véritables entrepreneurs de colportage en grand ; en ce cas, salariés, ils touchent un pourcentage sur les ventes. Mais la grande masse est misérable, surveillée, pourchassée par la police de tous les régimes successifs. Rares sont les grandes réussites, même s'il y en a eu d'éclatantes.
Une grande partie est faite de travailleurs saisonniers, qui quittent la montagne pendant l'hiver quand les neiges recouvrent le sol. Au printemps, ils reviennent au village, redeviennent alors paysans. D'autres au contraire, tels les Pyrénéens après 1800, abandonnent le travail de la terre, colportent toute l'année. Ils trouvent un toit et un couvert chez l'habitant, parfois à l'auberge. Les inventaires après décès de leurs modestes affaires attestent que certains meurent en cours de route, isolés, au bord du chemin ou à l'auberge.
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Michel Vernus
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